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Archive pour la catégorie ‘Jardins de la Bible’

Fête de saint Laurent, diacre et martyr

lundi 10 août 2015

St Laurent-Carlo_CrivelliL’exemple de saint Laurent nous encourage à donner notre vie, allume notre foi, attire notre dévotion. Ce ne sont pas les flammes du bûcher, mais celles d’une foi vive qui nous consument. Notre corps n’est pas brûlé pour la cause de Jésus Christ, mais notre âme est transportée des ardeurs de son amour…, notre cœur brûle d’amour pour Jésus. Le Sauveur lui-même n’a-t-il pas dit de ce feu sacré : « Je suis venu apporter un feu sur la terre, et comme je voudrais qu’il soit déjà allumé » ? (Lc 12,49) Cléophas et son compagnon en éprouvaient les effets quand ils disaient : « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, lorsqu’il nous parlait sur le chemin et qu’il nous expliquait les Ecritures ? » (Lc 24,32)

C’est aussi grâce à cet embrasement intérieur que saint Laurent demeure insensible aux flammes de son martyre ; il brûle du désir d’être avec Jésus et ne sent pas les tortures. Plus l’ardeur de la foi croit en lui, moins il souffre des tortures… La puissance du brasier divin allumé dans son cœur apaise les flammes du brasier attisé par le bourreau.

Saint Augustin (354-430), évêque d’Hippone (Afrique du Nord) et docteur de l’Église
Sermon 206 (attrib.)

 

 

 

« Moi, je suis le pain de la vie. »

dimanche 2 août 2015

CandleL’Église vit de l’eucharistie. Cette vérité n’exprime pas seulement une expérience quotidienne de foi, mais elle comporte en synthèse le cœur du mystère de l’Église. Dans la joie, elle fait l’expérience, sous de multiples formes, de la réalisation continuelle de la promesse : « Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde » (Mt 28,20). Mais, dans l’eucharistie, par la transformation du pain et du vin en corps et sang du Seigneur, elle jouit de cette présence avec une intensité unique. Depuis que, à la Pentecôte, l’Église, peuple de la Nouvelle Alliance, a commencé son pèlerinage vers la patrie céleste, ce sacrement divin a continué à marquer ses journées, les remplissant d’espérance confiante.

À juste titre, le Concile Vatican II a proclamé que le sacrifice eucharistique est « source et sommet de toute la vie chrétienne » (LG 11). « La très sainte eucharistie contient en effet l’ensemble des biens spirituels de l’Église, à savoir le Christ lui-même, notre Pâque, le pain vivant (1Co 5,7; Jn 6,51), qui par sa chair, vivifiée par l’Esprit Saint et vivifiante, procure la vie aux hommes » (Vatican II PO 5). C’est pourquoi l’Église a le regard constamment fixé sur son Seigneur, présent dans le sacrement de l’autel, dans lequel elle découvre la pleine manifestation de son immense amour.

Saint Jean-Paul II (1920-2005), pape
Encyclique « Ecclesia de Eucharistia », 1 (trad. © Libreria Editrice Vaticana)

 

 

 

Le levain du monde entier

lundi 27 juillet 2015

blé

Nous lisons dans l’Évangile : « Si le grain de blé ne tombe en terre et n’y meurt, il reste seul ; s’il meurt, il porte beaucoup de fruit » (Jn 12,24). Le Seigneur Jésus est le grain de blé, mais il est aussi le levain… En venant, homme et seul, dans le monde, le Seigneur Jésus a donné à tous les hommes la possibilité de devenir ce qu’il est lui-même. Tout homme qui s’unit au levain du Christ devient lui aussi du levain, utile à lui-même et profitable à tous ; il sera sauvé et il sauvera autrui.

Avant d’être disséminé dans un monceau de farine, le levain est broyé, écrasé, émietté, il est complètement dissous — mais c’est alors qu’il rassemble en une même fermentation les grains innombrables et dispersés de la farine. Il ramène en un corps solide une substance qui, d’elle-même, était aussi inconsistante que la poussière ; il fait, enfin, une pâte utile de ce qui semblait n’être qu’un vain éparpillement.

Ainsi le Seigneur Jésus Christ, levain du monde entier, a été brisé par beaucoup de souffrances, lacéré et détruit, et son suc, c’est à dire son précieux sang, s’est répandu pour nous, afin d’affermir, en s’y mêlant, tout le genre humain dispersé. Nous qui étions comme une farine de peuples, nous voilà rassemblés comme du levain ; nous qui gisions lamentablement par toute la terre, dispersés et broyés, nous voilà réunis au corps du Christ grâce à la puissance de sa Passion.

Saint Maxime de Turin (?-v. 420), évêque
Homélie 111 ; CC Sermon 25, p.97 ; PL 57, 511 (trad. Quéré-Jaulmes / En Calcat rev.)

 

 

 

 

Sts Anne et Joachim, mère et père de la Sainte Vierge

dimanche 26 juillet 2015

Anne appartenait à ce peuple choisi qui, dans les desseins de Dieu, devait donner naissance au Sauveur des hommes ; elle était de la tribu de Juda et de la race de David. Ses parents, recommandables par leur origine, devinrent surtout illustres entre tous leurs concitoyens par l’éclat d’une vie pleine de bonnes œuvres et de vertus. Dieu, qui avait prédestiné cette enfant à devenir l’aïeule du Sauveur, la combla des grâces les plus admirables.
Après Marie, aucune femme plus que sainte Anne ne fut bénie et privilégiée entre toutes les autres. Mais si elle reçut tant de grâces, comme elle sut y répondre par la sainteté de sa vie ! Toute jeune enfant, elle était douce, humble, modeste, obéissante et ornée des naïves vertus de son âge. Plus tard, comme elle sut bien garder intact le lis de sa virginité ! Comme elle dépassait toutes les filles, ses compagnes, par sa piété, par la réserve de sa tenue, son recueillement et la sainteté de toute sa conduite !

Puis, quand il plut à Dieu d’unir son sort à celui de Joachim, combien Anne fut une épouse prévenante, respectueuse, laborieuse, charitable et scrupuleusement fidèle à tous les devoirs de son état, vaquant à propos au travail et à la prière. Dieu lui refusa longtemps de devenir mère ; elle se soumit humblement à cette épreuve et l’utilisa pour sa sanctification. Mais à l’épreuve succéda une grande joie, car de Joachim et d’Anne, déjà vieux, naquit miraculeusement celle qui devait être la Mère du Sauveur et, dans l’ordre de la grâce, la Mère du genre humain. C’est sans doute un grand honneur pour sainte Anne, que d’avoir donné naissance à la Mère de Dieu ; mais il lui revient beaucoup plus de gloire d’avoir formé le cœur de Marie à la vertu et à l’innocence !

L’Église célébrera dans tous les âges la piété maternelle de sainte Anne, et la gloire de sa Fille rejaillira sur elle de génération en génération. Le culte de sainte Anne a subi diverses alternatives. Son corps fut transporté dans les Gaules, au premier siècle de l’ère chrétienne, et enfoui dans un souterrain de l’église d’Apt, en Provence, à l’époque des persécutions. À la fin du VIIIe siècle, il fut miraculeusement découvert et devint l’objet d’un pèlerinage. Mais c’est surtout au XVIIe siècle que le culte de sainte Anne acquit la popularité dont il jouit.

De tous les sanctuaires de sainte Anne, le plus célèbre est celui d’Auray, en Bretagne ; son origine est due à la miraculeuse découverte d’une vieille statue de la grande Sainte, accompagnée des circonstances les plus extraordinaires et suivies de prodiges sans nombre. Sainte-Anne d’Auray est encore aujourd’hui l’objet d’un pèlerinage national.

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Joachim, de la tribu de Juda et de l’antique famille de David, était pasteur de brebis à Nazareth. Stolan, père de sainte Anne, lui donna sa pieuse fille en mariage. Les deux époux vécurent dans la crainte du Seigneur et dans la pratique des bonnes œuvres. Ils firent trois parts de leurs biens : l’une était destinée au temple et aux ministres de la religion ; ils répandaient la seconde dans le sein des pauvres ; la dernière servait aux besoins de la famille.
Cependant le bonheur n’était pas dans ce ménage : l’épouse de Joachim était stérile. Depuis vingt ans ils priaient Dieu de les délivrer d’un tel opprobre, lorsqu’ils se rendirent, suivant leur coutume, à la ville sainte pour la fête des Tabernacles. Les enfants d’Israël y venaient offrir des sacrifices au Seigneur, et le grand-prêtre Ruben immolait leurs victimes. Joachim se présenta à son tour. Il portait un agneau ; Anne le suivait, la tête voilée, le cœur plein de soupirs et de larmes. Le grand-prêtre, en les apercevant monter les degrés du temple, n’eut pour eux que des paroles de mépris et de reproche : « Vous est-il permis, leur dit-il, de présenter votre offrande au Seigneur, vous qu’Il n’a pas jugés dignes d’avoir une postérité ? Ne savez-vous pas qu’en Israël l’époux qui n’a pas la gloire d’être père est maudit de Dieu ? » Et en présence du peuple il repoussa leur offrande.

Joachim ne voulut point revenir à Nazareth avec les témoins de son opprobre. Leur présence eût augmenté sa douleur. Anne retourna seule dans sa demeure. Pour lui, il se retira dans une campagne voisine de Jérusalem, où des bergers gardaient ses troupeaux. Le calme silencieux de la vie pastorale, le spectacle touchant de la nature, apportèrent quelque soulagement à la blessure de son cœur. Qui n’a jamais senti que la solitude le rapproche de Dieu ?

Un jour qu’il se trouvait seul dans les champs, l’Ange Gabriel se tint debout devant lui. Joachim se prosterna, tremblant de peur : « Ne crains pas, dit le messager céleste, je suis l’Ange du Seigneur, et c’est Dieu Lui-même qui m’envoie. Il a prêté l’oreille à ta prière, tes aumônes sont montées en Sa présence. Anne, ton épouse, mettra au monde une fille ; vous la nommerez Marie et vous la consacrerez à Dieu dans le temps ; le Saint-Esprit habitera dans son âme dès le sein de sa mère et Il opérera en elle de grandes choses.» Après ces mots, l’Ange disparut.

Joachim vit bientôt se réaliser la prédiction de l’Archange. De son côté, il fut fidèle aux ordres du Seigneur : sa fille reçut le nom de Marie, et, à trois ans, il la confia aux pieuses femmes qui élevaient dans le temple de Jérusalem les jeunes filles consacrées au Seigneur. Elle y vivait depuis huit ans sous le regard de Dieu lorsque Joachim mourut chargé de mérites et de vertus. Anne, son épouse, le fit ensevelir dans la vallée de Josaphat, non loin du jardin de Gethsémani, où elle devait le rejoindre un an plus tard.

Source principale : Abbé L. Jaud -Vie des Saints…- (« Rév. x gpm »).

 

 

 

 

« Cent, ou soixante, ou trente pour un »

vendredi 24 juillet 2015

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L’ensemencement a été fait par les apôtres et les prophètes, mais c’est le Seigneur lui-même qui sème. C’est le Seigneur lui-même qui était présent en eux, du moment que c’est le Seigneur lui-même qui a moissonné. Car sans lui ils ne sont rien, alors que lui, sans eux, demeure dans sa perfection. Il leur dit en effet : « Hors de moi vous ne pouvez rien faire » (Jn 15,5). Semant donc chez les nations, que dit le Christ ? « Un semeur est sorti pour semer. » (Mt 13,3) Dans un autre texte des moissonneurs étaient envoyés à la moisson ; maintenant le semeur sort pour semer, et il ne plaint pas sa peine. Qu’importe, en effet, que du grain tombe sur le chemin, ou sur des pierres ou dans les épines ? S’il se laissait décourager par ces endroits ingrats, il n’avancerait pas jusqu’à la bonne terre ! …

Il s’agit de nous : serons-nous ce chemin, ces pierres, ces ronces ? Voulons-nous être la bonne terre ? Disposons notre cœur à rapporter trente fois plus, soixante fois plus, cent fois, mille fois plus. Trente fois, mille fois, c’est chaque fois du blé, et rien que du blé. Ne soyons plus ce chemin où la semence est piétinée par les passants et où notre ennemi s’en empare comme un oiseau. Plus ces pierres où une terre peu profonde fait germer trop vite un grain qui ne peut pas affronter l’ardeur du soleil. Jamais plus de ces ronces, les convoitises de ce monde, cette application à faire le mal. Quoi de pire, en effet, que de donner tous ses efforts à une vie qui empêche de parvenir à la vie ? Quoi de plus malheureux que de choyer la vie pour perdre la vie ? Quoi de plus triste que de redouter la mort pour tomber au pouvoir de la mort ? Arrachons les épines, préparons le terrain, recevons la semence, tenons jusqu’à la moisson, aspirons à être reçus dans les greniers.

Saint Augustin (354-430), évêque d’Hippone (Afrique du Nord) et docteur de l’Église
Sermon 101 ; PL 38, 605 (trad. Luc commenté, DDB 1987, p. 76 rev.)

 

 

 

 

« Mon joug est facile à porter. »

jeudi 16 juillet 2015

Ceux qui se plaignent de la rudesse du joug du Seigneur n’ont peut-être pas rejeté complètement le joug si pesant de la convoitise du monde, ou s’ils l’ont rejeté, ils s’y sont à nouveau asservis, à leur plus grande honte. Au dehors ils portent le joug du Seigneur, mais au-dedans ils soumettent leurs épaules au fardeau des préoccupations du monde. Ils mettent sur le compte de la pesanteur du joug du Seigneur les peines et les douleurs qu’ils s’infligent à eux-mêmes… Quant au joug du Seigneur, il est « doux et son fardeau léger ».

En effet, quoi de plus doux, quoi de plus glorieux que de se voir élevé au-dessus du monde par le mépris que l’on en fait et, installé au faîte d’une conscience en paix, d’avoir ce monde entier à ses pieds ? On ne voit alors rien à désirer, rien à craindre, rien à envier, rien à soi qui pourrait vous être enlevé, rien de mal qui pourrait vous être causé par un autre. Le regard du cœur se dirige vers « l’héritage incorruptible, exempt de souillure et de flétrissure, qui nous est réservé dans les cieux » (1P 1,4). Avec une sorte de grandeur d’âme, on fait peu de cas des richesses du monde : elles passent ; des plaisirs de la chair : ils sont souillés ; des fastes du monde : ils se fanent ; et dans la joie, on reprend cette parole du prophète : « Toute chair n’est qu’herbe des champs, toute sa grâce n’est qu’herbe en fleur ; l’herbe a séché, la fleur s’est fanée, mais la Parole du Seigneur demeure pour toujours » (Is 40,6-8)… Dans la charité, et rien que dans la charité résident la vraie tranquillité, la vraie douceur, car c’est elle le joug du Seigneur.

Saint Aelred de Rievaulx (1110-1167), moine cistercien
Le Miroir de la charité, I, 30-31 (trad. Brésard, 2000 ans A, p. 188 rev.)

 

 

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Laudato si

jeudi 9 juillet 2015

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(…) Cette fois, nous sommes plus que jamais au pied du mur?: il s’agit d’embrasser dans un même mouvement l’avenir de la planète et celui de la communauté des hommes. Leur maison Terre est en feu. Ils doivent s’emparer de son destin, pour que le leur continue.
(…) Tous les membres de la famille humaine sont désormais dans le même bateau. La dégradation visible et invisible de la planète menace jusqu’à sa survie. Il est temps de regarder les choses en face et d’organiser le sauvetage, au plan mondial.
(…) Contemplation, admiration, communauté… En listant les clés rafraîchissantes propres à nous sortir de l’impasse, le pape François nous aide à prendre de la hauteur, et nous donne des forces pour changer. Nul esprit de fatalité dans ces pages, mais une solide confiance dans la créativité de l’amour. L’humanité confrontée aux limites de sa maison commune est capable d’intérioriser les exigences d’une fraternité universelle. Dieu aidant. C’est là que se situe toute la différence entre cette encyclique et les alertes désespérées qui risquent de tétaniser plus que de mobiliser. C’est à partir de l’émerveillement pour la beauté de la création, en puisant ses forces dans la transcendance, et dans le Christ qui récapitule toute la Création, que sera trouvé le ressort du changement. Il est spirituel. Ce supplément d’âme est indispensable pour accueillir joyeusement la perspective d’une sobriété heureuse et partagée.

Tugdual Derville?, ?co-initiateur du Courant pour une Écologie Humaine
« Laudato Si, un douloureux éblouissement? » (extraits)
famillechretienne.fr 18/06/2015

* « Loué sois-tu », encyclique du pape François sur l’écologie. Bayard, Cerf, Mame, pour l’édition officielle de la Conférence des évêques de France.

 

« Priez le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson. »

mardi 7 juillet 2015

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Il y a bien des gens qui, pour avoir l’extérieur bien composé et l’intérieur rempli de grands sentiments de Dieu, s’arrêtent à cela…; ils se contentent des doux entretiens qu’ils ont avec Dieu dans l’oraison… Ne nous trompons pas : toute notre tâche consiste à passer aux actes. Et cela est tellement vrai que l’apôtre saint Jean nous déclare qu’il n’y a que nos œuvres qui nous accompagnent dans l’autre vie (Ap 14,13). Faisons donc réflexion à cela ; d’autant plus qu’en ce siècle il y en a beaucoup qui semblent vertueux, et qui en effet le sont, qui néanmoins inclinent à une voie douce et molle plutôt qu’à une dévotion laborieuse et solide.

L’Église est comparée à une grande moisson qui requiert des ouvriers, mais des ouvriers qui travaillent. Il n’y a rien de plus conforme à l’Évangile que d’amasser, d’un côté, des lumières et des forces pour son âme dans l’oraison, dans la lecture et dans la solitude, et d’aller ensuite faire part aux hommes de cette nourriture spirituelle. C’est faire comme notre Seigneur a fait, et, après lui, ses apôtres ; c’est joindre l’office de Marthe à celui de Marie ; c’est imiter la colombe, qui digère à moitié la pâture qu’elle a prise et puis met le reste par son bec dans celui de ses petits pour les nourrir. Voilà comme nous devons faire, voilà comme nous devons témoigner à Dieu par nos œuvres comme nous l’aimons. Toute notre tâche consiste à passer aux actes.

Saint Vincent de Paul (1581-1660), prêtre, fondateur de communautés religieuses
Entretiens spirituels aux Missionnaires, fragment 171 (Seuil 1960 p. 908 et Orval)

 

 

 

« Si Dieu habille ainsi l’herbe des champs, ne fera-t-il pas bien davantage pour vous, hommes de peu de foi ? »

samedi 20 juin 2015

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Au nom du Dieu saint, je prends aujourd’hui la plume pour que mes paroles, s’estampant sur la feuille blanche, servent de louange perpétuelle au Dieu béni, auteur de ma vie, de mon âme, de mon cœur. Je voudrais que l’univers entier, avec les planètes, tous les astres et les innombrables systèmes stellaires, soient une immense étendue, polie et brillante, où je pourrais écrire le nom de Dieu. Je voudrais que ma voix soit plus puissante que mille tonnerres, et plus forte que le fracas de la mer, et plus terrible que le grondement des volcans, pour seulement dire : Dieu ! Je voudrais que mon cœur soit aussi grand que le ciel, pur comme celui des anges, simple comme celui de la colombe (Mt 10,16), pour y mettre Dieu ! Mais puisque toute cette grandeur dont tu rêves ne peut pas devenir réalité, contente-toi de peu et de toi-même qui n’es rien, Frère Raphaël, car le rien même doit te suffire…

Pourquoi se taire ? Pourquoi le cacher ? Pourquoi ne pas crier au monde entier et publier aux quatre vents les merveilles de Dieu ? Pourquoi ne pas dire aux gens et à tous ceux qui veulent l’entendre : voyez-vous ce que je suis ? Voyez-vous ce que j’ai été ? Voyez-vous ma misère se traînant dans la boue ? Car peu importe : émerveillez-vous ; malgré tout ça, je possède Dieu. Dieu est mon ami ! Dieu m’aime, moi, d’un tel amour que, si le monde entier le comprenait, toutes les créatures deviendraient folles et hurleraient de stupeur. Et encore, cela est peu. Dieu m’aime tellement que même les anges n’y comprennent rien ! (cf. 1P 1,12) La miséricorde de Dieu est grande ! M’aimer, moi, être mon ami, mon frère, mon père, mon maître. Être Dieu, et moi, être ce que je suis !

Ah, mon Jésus, je n’ai ni papier, ni plume. Que puis-je dire ! Comment ne pas devenir fou ?

Saint Raphaël Arnáiz Barón (1911-1938), moine trappiste espagnol
Écrits spirituels, 04/03/1938, (trad. Cerf 2008, p. 372)

 

 

 

 

« Il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons. »

mardi 16 juin 2015

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Annonce la bonté de Dieu. Car alors que tu es indigne, il te dirige, et alors que tu lui dois tout, il ne te réclame rien. Et pour les petites choses que tu fais, il te donne en retour de grandes choses. N’appelle pas Dieu donc simplement juste. Car ce n’est pas par rapport à ce que tu fais toi qu’il révèle sa justice. Si David le nomme juste et droit (Ps 32,5), son Fils nous a révélé qu’il est bien plutôt bon et doux : « Il est bon pour les méchants et les impies » (Lc 6,35).

Comment peux-tu en rester à la simple justice de Dieu, quand tu lis le chapitre sur le salaire des ouvriers ? « Mon ami, je ne te fais aucun tort, je veux donner à ce dernier venu autant qu’à toi. Vas-tu regarder avec un œil mauvais parce moi je suis bon ? » (Mt 20,13-15). Comment peut-on dire simplement que Dieu est juste quand on lit le chapitre du fils prodigue qui a dissipé la richesse de son père dans la débauche, comment à la seule componction qu’il a montrée, son père a couru vers lui, s’est jeté à son cou et lui a donné plein pouvoir sur toute sa richesse ? (Lc 15,11s) Ce n’est pas un autre qui nous a dit cela sur Dieu, pour que nous en doutions. C’est son Fils lui-même ; lui-même a donné de Dieu ce témoignage. Où donc est la justice de Dieu ? N’est-ce pas en ce qu’« alors que nous étions pécheurs, le Christ est mort pour nous » ? (Rm 5,8) Si Dieu se montre compatissant ici bas, croyons qu’il l’est depuis toute éternité.

Isaac le Syrien (7e siècle), moine près de Mossoul
Discours ascétiques, 1ère série, n° 60 (trad. DDB 1981, p. 324 rev.)