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« Cent, ou soixante, ou trente pour un. »

28 juillet 2023

L’ensemencement a été fait par les apôtres et les prophètes, mais c’est le Seigneur lui-même qui sème. C’est le Seigneur lui-même qui était présent en eux, du moment que c’est le Seigneur lui-même qui a moissonné. Car sans lui ils ne sont rien, alors que lui, sans eux, demeure dans sa perfection. Il leur dit en effet : « Hors de moi vous ne pouvez rien faire » (Jn 15,5). Semant donc chez les nations, que dit le Christ ? « Un semeur est sorti pour semer. » (Mt 13,3) Dans un autre texte des moissonneurs étaient envoyés à la moisson ; maintenant le semeur sort pour semer, et il ne plaint pas sa peine. Qu’importe, en effet, que du grain tombe sur le chemin, ou sur des pierres ou dans les épines ? S’il se laissait décourager par ces endroits ingrats, il n’avancerait pas jusqu’à la bonne terre ! …

Il s’agit de nous : serons-nous ce chemin, ces pierres, ces ronces ? Voulons-nous être la bonne terre ? Disposons notre cœur à rapporter trente fois plus, soixante fois plus, cent fois, mille fois plus. Trente fois, mille fois, c’est chaque fois du blé, et rien que du blé. Ne soyons plus ce chemin où la semence est piétinée par les passants et où notre ennemi s’en empare comme un oiseau. Plus ces pierres où une terre peu profonde fait germer trop vite un grain qui ne peut pas affronter l’ardeur du soleil. Jamais plus de ces ronces, les convoitises de ce monde, cette application à faire le mal. Quoi de pire, en effet, que de donner tous ses efforts à une vie qui empêche de parvenir à la vie ? Quoi de plus malheureux que de choyer la vie pour perdre la vie ? Quoi de plus triste que de redouter la mort pour tomber au pouvoir de la mort ? Arrachons les épines, préparons le terrain, recevons la semence, tenons jusqu’à la moisson, aspirons à être reçus dans les greniers.

Saint Augustin (354-430)

 

 

 

Le plantureux paradis des Écritures spirituelles

27 juillet 2023

Parmi les vérités que l’autorité des divines Écritures a destinées à notre instruction, il en est qui expriment avec une si évidente clarté, voire pour les esprits les moins doués de pénétration, que non seulement elles ne se voilent pas de l’obscurité d’un sens plus secret, mais que le secours même de l’exégèse ne leur est pas nécessaire ; les mots, la lettre seule en livrent tout le sens. D’autres, au contraire, se dérobent sous de mystérieuses obscurités, et ouvrent aux efforts et à la sollicitude de qui veut les éclaircir et les comprendre un champ immense. (…)

On comparerait assez justement l’Écriture à une terre riche et féconde. Dans cette terre, beaucoup de produits naissent et se développent qui profitent à la vie de l’homme sans cuisson préalable. Certains autres, s’ils ne perdaient au feu leur âpreté native, pour devenir doux et tendres, se montreraient impropres à notre usage ou même nuisibles. Quelques-uns sont naturellement aptes à se prendre en l’une et l’autre forme : s’ils ne passent point au feu, leur crudité n’est pas désagréable ni en cause non plus aucun mal ; la cuisson toutefois ajoute à leur bons effets. (…)

On distingue, semble-t-il, avec assez d’évidence une semblable économie dans le plantureux paradis des Écritures spirituelles. Certains passages resplendissent, dès le sens littéral, d’une si lumineuse clarté, que, à prendre simplement les mots comme ils sonnent, ils offrent aux auditeurs l’aliment le plus substantiel et le plus abondant. (…) D’autres, au contraire, s’ils ne s’affinaient par l’interprétation allégorique et ne s’adoucissaient à l’épreuve du feu spirituel, loin de fournir à l’homme intérieur un aliment salutaire et pur de tout germe mauvais, tourneraient à son détriment plutôt qu’à son profit. (…) Quelques passages se prennent littéralement et au sens allégorique d’une manière également avantageuse et nécessaire ; dans l’un et l’autre cas, l’âme y puise des sucs nourrissants.

Saint Jean Cassien (v. 360-435)

 

 

 

« Beaucoup de prophètes et de justes ont désiré voir ce que vous voyez. »

26 juillet 2023

Le prophète dit dans un psaume : « Mon âme languit après ton salut ; j’espère en ta parole » (118,81). (…) Qui exprime cet ardent désir sinon « la race choisie, le sacerdoce royal, la nation sainte, le peuple qui appartient à Dieu » (1P 2,9), chacun à son époque, dans tous ceux qui ont vécu, qui vivent et qui vivront, depuis l’origine du genre humain jusqu’à la fin de ce monde ? (…) C’est pourquoi le Seigneur lui-même a dit à ses disciples : « Beaucoup de prophètes et de justes ont désiré voir ce que vous voyez ». C’est donc leur voix qu’il faut reconnaître dans ce psaume. (…) Ce désir n’a jamais cessé dans les saints et il ne cesse pas, maintenant encore, dans « le Corps du Christ qui est l’Église » (Col 1,18), jusqu’à ce que vienne « le Désiré de toutes les nations » (Ag 2,8 Vulg). (…)

Les premiers temps de l’Église, avant l’enfantement de la Vierge, ont donc compté des saints qui désiraient la venue du Christ dans la chair ; et les temps où nous sommes depuis son Ascension comptent d’autres saints qui désirent la manifestation du Christ pour juger les vivants et les morts. Jamais, depuis le commencement jusqu’à la fin des temps, ce désir de l’Église n’a perdu de son ardeur, si ce n’est pendant que le Seigneur a vécu sur terre en compagnie de ses disciples.

Saint Augustin (354-430)

 

 

 

Fête de saint Jacques (le majeur), apôtre

25 juillet 2023

L’Évangile résume ainsi l’appel du Christ à Jacques et à Jean, et la réponse des deux frères : « Laissant à l’heure même leurs filets et leur père, ils le suivirent » (Mt 4, 22). C’est peu, en apparence, mais beaucoup en réalité. Jacques, en effet, tout comme son frère, laissant son père Zébédée dans la barque qui flottait près du rivage (…) noyait pour toujours dans les flots ses affections passées et remettait sans réserve son avenir entre les mains du divin Maître. (…)

Avec son impétuosité généreuse, Jacques avait bien débuté ; mais comment a-t-il continué ? L’Évangile nous renseigne en quelques traits. De la part de Jésus, dont l’amour ne change pas, il fut l’objet d’une spéciale prédilection. Lui, son frère Jean et Pierre, leur voisin et compagnon de pêche, formaient une triade à laquelle Jésus réserva des faveurs singulières : ils furent les seuls témoins (…) de sa gloire dans la Transfiguration (Mt 17,1-8), de sa tristesse et de sa soumission dans l’agonie de Gethsémani (Mc 14,33). Mais c’est ici précisément que Jacques manqua de fidélité à son divin Maître. Il l’avait pourtant aimé avec sincérité ; il l’avait suivi avec ardeur ; et non sans raison Jésus avait donné aux deux frères, fils de Zébédée le surnom de « fils du tonnerre » (Mc 3,17). Leur mère, ambitieuse, (…), avait un jour osé quémander à Jésus pour ses fils les premiers postes de son royaume. À la question du Sauveur : « Pouvez-vous boire le calice que je boirai ? » les deux intéressés avaient de bonne foi répondu : « Nous le pouvons » (Mt 20,20-22).

Ô Jacques, ton frère Jean, l’Apôtre de l’amour, sera au moins présent sur le Calvaire ; mais toi, où seras-tu alors ? La défection commença à Gethsémani, quand les trois apôtres préférés s’attirèrent cette douloureuse plainte du Sauveur : « Ainsi, vous n’avez pu veiller une heure avec moi ? » (Mt 26,40). (…) Mais Saint Jacques but effectivement le calice que Jésus lui avait prédit (…) : il mourut martyr (cf. Ac 12,12). La faiblesse de l’abandon aux heures tristes de la Passion avait été pardonnée et oubliée par le Rédempteur.

Vénérable Pie XII

 

 

 

Crois en la résurrection !

24 juillet 2023

Dans un sépulcre de roc, il fut comme homme déposé réellement, mais les rochers se brisèrent de crainte à cause de lui. Il descendit dans les lieux souterrains pour racheter jusque de là, les justes. (…) Celui qui est descendu aux enfers en est remonté, et Jésus enseveli est ressuscité le troisième jour, réellement.

Si un jour on t’attaque, fais vite front en posant cette question : « Jonas après trois jours n’est-il donc pas ressuscité de terre ? » Un mort, pour avoir touché les os d’Élisée, a ressuscité (cf. 2R 13,21), et le créateur des hommes, à plus forte raison, par la puissance du Père ne ressuscite-t-il pas plus aisément encore ? Il est donc ressuscité réellement et une fois ressuscité il a été revu par ses disciples. Et les douze disciples, témoins de sa résurrection (cf. Ac 2,32.33), n’ont point témoigné en des discours fleuris, mais ils ont soutenu, sur la réalité de la résurrection, des combats qui allèrent jusqu’aux supplices de la mort.

Eh quoi ? selon l’Écriture : « Sur l’affirmation de deux et de trois témoins sera réglée toute affaire » (Dt 19,15). En voici douze et tu es encore incrédule sur la résurrection ?

Saint Cyrille de Jérusalem (313-350)

 

 

 

 

« Jusqu’à ce que toute la pâte ait levé. »

23 juillet 2023

Si quelqu’un pétrit de la farine sans y mêler du levain, il aura beau s’y appliquer, la malaxer et la travailler, la pâte ne lèvera pas et ne pourra pas servir d’aliment. Mais quand on y a mélangé du levain, celui-ci tire à lui toute la pâte et la fait lever toute entière, comme dans la comparaison que le Seigneur a appliquée au Royaume… Il en est de même pour la viande : quelque soin qu’on en prenne, si on néglige d’y mettre du sel pour la conserver…, elle sentira mauvais et deviendra impropre à la consommation. D’une manière semblable, représente-toi l’humanité entière comme de la viande ou de la pâte, et pense que la nature divine du Saint Esprit est le sel et le levain qui viennent d’un autre monde. Si le levain céleste de l’Esprit et le sel bon de la nature divine…ne sont pas introduits dans la nature humaine humiliée et mêlés à elle, l’âme ne perdra jamais la mauvaise odeur du péché et elle ne lèvera pas en perdant la lourdeur et le défaut du « levain de la méchanceté » (1Co 5,7)…

Si l’âme s’appuie seulement sur sa propre force et se croit capable d’obtenir par elle-même la réussite complète sans l’aide de l’Esprit, elle se trompe grandement ; elle n’est pas faite pour les demeures du ciel, pas faite pour le Royaume… Si l’homme pécheur ne s’approche pas de Dieu, ne renonce pas au monde, n’attend pas dans l’espérance et la patience un bien étranger à sa propre nature, c’est-à-dire la force du Saint Esprit, si le Seigneur n’instille pas d’en haut sa propre vie divine en cette âme, cet homme ne goûtera jamais la vraie vie… Par contre, s’il a reçu la grâce de l’Esprit, s’il ne s’en détourne pas, s’il ne l’offense pas par sa négligence et ses mauvaises actions, si, persévérant longtemps ainsi dans le combat, il « n’attriste pas l’Esprit » (Ep 4,30), il aura le bonheur d’obtenir la vie éternelle.

Homélie attribuée à saint Macaire d’Égypte (?-390)

 

 

 

Fête de sainte Marie-Madeleine, disciple du Seigneur

22 juillet 2023

« Jésus lui dit : Ne me touche pas, car je ne suis pas encore monté vers mon Père. » Ces paroles contiennent une vérité que nous devons examiner avec beaucoup d’attention. Jésus enseigne la foi à cette femme qui l’avait reconnu comme maître et lui avait donné ce titre. Le divin jardinier semait une graine de moutarde dans le cœur de Marie Madeleine, comme il l’aurait fait dans un jardin (Mt 13,31). Mais que signifie donc : « Ne me touche pas, car je ne suis pas encore monté vers mon Père » ?…

On peut dire que par ces mots Jésus a voulu que la foi qu’on a en lui, foi par laquelle on le touche spirituellement, aille jusqu’à croire que lui et son Père sont un (Jn 10,30). Car celui qui progresse en lui jusqu’à reconnaître qu’il est l’égal du Père monte en quelque sorte jusqu’au Père dans le secret de son âme. Autrement, on ne touche pas le Christ comme il le veut, c’est-à-dire on n’a pas en lui la foi qu’il demande.

Marie pouvait croire en lui tout en pensant qu’il n’était pas l’égal du Père : voilà l’erreur que le Seigneur écarte en disant : « Ne me touche pas. » C’est-à-dire : « Ne crois pas en moi dans l’esprit où tu es encore. N’en reste pas à penser à ce que je me suis fait pour toi sans aller jusqu’à penser à cette nature divine qui t’a faite toi-même. » Comment pouvait-elle ne pas croire encore de façon tout humaine en celui qu’elle pleurait comme un homme ? « Je ne suis pas encore monté vers mon Père, lui dit-il. Tu me toucheras quand tu croiras que je suis Dieu, parfaitement égal au Père. »

Saint Augustin (354-430)

 

 

 

« Le Fils de l’homme est maître du sabbat. »

21 juillet 2023

Nous ne voyons pas que les paroles de la Genèse : « Au jour du sabbat Dieu s’est reposé de ses œuvres » se soient réalisées en ce septième jour de la création, ni même qu’elles se réalisent aujourd’hui. Nous voyons toujours Dieu au travail. Il n’y a pas de sabbat où Dieu cesse de travailler, de jour où il ne « fasse paraître son soleil sur les bons et sur les méchants et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes », où « il ne fasse pousser l’herbe sur les montagnes et les plantes au service des hommes » (…), où « il ne fasse mourir et ne fasse vivre. »

Aussi, le Seigneur répond à ceux qui l’accusaient de travailler et de guérir le jour du sabbat : « Mon Père travaille jusqu’à maintenant, et moi aussi je travaille. » Il montrait par là que, durant le temps de ce monde, il n’y a pas de sabbat où Dieu se repose de veiller à la marche du monde et aux destinées du genre humain. (…) Dans sa sagesse de Créateur il ne cesse d’exercer sur ses créatures sa providence et sa bienveillance « jusqu’à la fin du monde ». Donc le vrai sabbat où Dieu se reposera de tous ses travaux sera le monde futur, quand « douleur, tristesse et gémissements s’enfuiront », et que Dieu sera « tout en tous ».

Origène (v. 185-253)

(Références bibliques : Gn 2,2; Mt 5,45; Ps 146,8; 1Sm 2,6; Jn 5,17; Mt 28,20; Is 35,10 LXX; Col 3,11)

 

 

Les parfums du Christ

20 juillet 2023

L’humilité fervente est le fruit de la lumière de Dieu sur l’âme. Il serait donc vain de prétendre l’acquérir par ses propres efforts. (…) Il est nécessaire de demander la lumière d’humilité. Il n’importe pas moins de la bien recevoir. (…)

« Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur » proclame Jésus. L’humilité et la douceur sont ses vertus caractéristiques, le parfum personnel de son âme, celui qu’il laisse sur son passage et qui indique les lieux où il règne. L’humilité du Christ Jésus, humilité fervente par excellence, procède de la lumière du Verbe qui habite corporellement en lui et l’écrase de sa transcendance. Car entre la nature divine et la nature humaine du Christ Jésus, unies par les liens de l’union hypostatique, subsiste la distance de l’Infini… Cet Infini écrase l’humanité et la plonge en des abîmes d’adoration et d’humilité où nul autre ne saurait le suivre, car nul autre n’a contemplé de si près et si profondément l’Infini. Mais cet infini est amour qui se donne, onction qui se répand. Aussi l’écrasement qu’il produit est-il suave, paisible et béatifiant. Le Christ Jésus est aussi doux qu’il est humble.

Humilité et douceur, force et suavité, parfum du Christ et aussi parfum de l’humilité fervente, c’est le signe authentique de contacts divins et un appel discret mais pressant à de nouvelles visites de la Miséricorde de Dieu.

Bienheureux Marie-Eugène de l’Enfant-Jésus (1894-1967)

 

 

 

Je T’adore, mon Créateur et mon Seigneur !

19 juillet 2023

Je T’adore, Créateur et Seigneur, caché dans le Très Saint Sacrement. Je T’adore pour toutes les œuvres de Tes mains dans lesquelles apparaissent tant de sagesse, de bonté et de miséricorde ; ô Seigneur, Tu as semé tant de beauté par toute la terre, et elle me parle de Ta splendeur, bien qu’elle ne soit que Ton faible reflet, inconcevable Beauté. Quoique Tu Te sois caché et dissimulé et que Tu aies dissimulé ta Beauté, mon œil illuminé par la foi T’atteint et mon âme reconnaît Son Créateur, son Bien suprême, et mon cœur entier sombre dans la prière de louange.

Mon Créateur et mon Seigneur, Ta bonté m’a encouragée à Te parler – Ta miséricorde fait disparaître l’abîme qui existe entre nous, qui sépare le Créateur de Sa créature. Parler avec Toi, ô Seigneur, est le délice de mon cœur ; je trouve en Toi tout ce que mon cœur peut désirer. Là Ta lumière éclaire mon esprit et le rend capable de Te connaître toujours plus profondément. Là, sur mon cœur se déversent des torrents de grâces, là mon âme puise la vie éternelle.

Ô mon Créateur et mon Seigneur, au-dessus de tous ces dons Toi, Tu Te donnes Toi-même à moi, et Tu T’unis étroitement avec Ta misérable créature. Ici nos cœurs se comprennent au-delà des mots ; ici personne n’est capable d’interrompre notre conversation. Ce dont je parle avec Toi, Ô Jésus, c’est notre secret, que les créatures ne connaîtront pas, et les anges n’ont pas l’audace de demander. Ce sont de secrets pardons que seuls Jésus et moi savons – c’est le secret de Sa miséricorde qui enveloppe chaque âme en particulier.

Pour cette inconcevable bonté, je T’adore, mon Créateur et mon Seigneur, de tout mon cœur et de toute mon âme. Et quoique mon adoration soit si pauvre et si petite, je suis cependant en paix, car je sais que Toi Tu sais qu’elle est sincère malgré son incapacité…

Sainte Faustine Kowalska (1905-1938)