ACCUEIL

Archive pour le mot-clef ‘charité’

« Ceux-là ont touché leur récompense. »

mercredi 16 juin 2021

« Évitez de pratiquer votre justice devant les hommes. » Pourquoi ? « Pour ne pas être remarqué par eux. » Et s’ils vous ont remarqué, qu’en sera-t-il pour vous ? « Vous n’aurez pas de récompense auprès de votre Père qui est aux cieux. » Frères, ici le Seigneur ne porte pas de jugement, mais il expose. Il met en lumière la ruse de nos pensées ; il met à nu les dispositions secrètes des âmes. À ceux qui méditent injustement sur la justice, il indique la mesure d’une juste rétribution. La justice qui se place devant les yeux des hommes ne peut pas attendre du Père son salaire divin. Elle a voulu être vue, et elle a été vue ; elle a voulu plaire aux hommes, et elle a plu. Elle a le salaire qu’elle a voulu ; la récompense qu’elle n’a pas voulu avoir, elle ne l’aura pas. (…)

« Quand tu fais l’aumône, ne le claironne pas devant toi, comme font les hypocrites. » « Claironner », c’est le terme juste, parce qu’une aumône de cette sorte est un acte guerrier plutôt que pacifique. Elle passe tout entière dans son cri, elle n’a rien à voir avec la miséricorde. Elle est du pays de la désunion, elle n’a pas été nourrie par la bonté. C’est un trafic pour la parade, non un commerce chaste (…) « Toi donc, quand tu fais l’aumône, ne le claironne pas devant toi, comme font les hypocrites dans les synagogues ou dans les rues, afin d’être glorifié par les hommes. En vérité, je vous le dis, ils ont touché leur récompense. » Vous avez entendu : l’aumône faite dans une assemblée, sur les places publiques, dans les carrefours, n’est pas une dépense faite pour le soulagement des pauvres, mais elle est placée devant le regard des hommes pour s’attirer leur estime. (…) Fuyons l’hypocrisie, mes frères, fuyons-la. (…) Elle ne soulage pas le pauvre ; la plainte de l’indigent lui est un prétexte pour rechercher plus activement une gloire spectaculaire. Elle gonfle sa louange de la souffrance du pauvre.

Saint Pierre Chrysologue (v. 406-450)

 

 

Cent pour un !

mardi 25 mai 2021

[Sainte Catherine a entendu Dieu lui dire :] À Pierre qui lui demandait : « Maître, nous avons tout quitté pour l’amour de vous, et nous vous avons suivi ! Que nous donnerez-vous en retour ? », ma Vérité fit cette réponse : « Je vous donnerai cent pour un et vous posséderez la vie éternelle » (cf. Mc 10, 28-30). – Comme s’il eût dit : Pierre, tu as bien fait de tout quitter ; c’était l’unique moyen de me suivre. En retour, moi, je te donnerai, en cette vie, cent pour un !

Quel est donc, très chère fille, ce centuple, que doit suivre encore la vie éternelle ? Qu’entendait et que voulait dire ma Vérité ? Parlait-elle des biens temporels ? Pas spécialement, bien que je les multiplie parfois au bénéfice de ceux qui se montrent généreux dans leurs aumônes. Et qu’est-ce donc ? ‒ Entends-le bien, celui qui donne sa volonté, me donne « une » chose : sa volonté. Et moi, pour cette unique chose, je lui donne « cent ».

Pourquoi ce nombre de « cent » ? Parce que cent est le nombre parfait, auquel on ne peut rien ajouter, à moins de recommencer à compter par un premier. La charité, elle aussi, est la plus parfaite de toutes les vertus ; l’on ne saurait s’élever à une vertu plus parfaite, et l’on ne peut ajouter à sa perfection qu’en revenant à la connaissance de soi-même pour recommencer une nouvelle centaine de mérites, mais c’est toujours au nombre « cent » que l’on arrive et que l’on s’arrête. Voilà le centuple que j’ai donné à ceux qui m’ont apporté l’un de leur volonté propre, soit par l’obéissance commune soit par l’obéissance particulière.

C’est avec ce centuple, que vous obtenez la vie éternelle (…). Ce centuple c’est le feu de la divine charité. Et parce qu’ils ont reçu de moi ce centuple, ils sont dans une merveilleuse allégresse qui prend tout leur cœur.

Sainte Catherine de Sienne (1347-1380)

 

 

« Je trouve ma gloire en eux. »

mardi 18 mai 2021

« Le Père et moi, disait le Fils, nous viendrons chez lui », c’est-à-dire chez l’homme qui est saint, « nous irons demeurer auprès de lui ». Et je pense que le prophète n’a pas parlé d’un autre ciel, lorsqu’il a dit : « Tu habites chez les saints, toi la gloire d’Israël ! » Et l’apôtre Paul dit clairement : « Par la foi, le Christ habite en nos cœurs ». Il n’est donc pas surprenant que le Christ se plaise à habiter ce ciel-là. Alors que pour créer le ciel visible il lui a suffi de parler, il a lutté pour acquérir celui-là ; il est mort pour le racheter. C’est pourquoi, après tous ses travaux, ayant réalisé son désir, il dit : « Voici le lieu de mon repos à tout jamais, c’est là le séjour que j’avais choisi ». Et bienheureuse celle à qui il est dit : « Viens, mon épouse choisie », je mettrai mon trône en toi.

« Pourquoi, maintenant, te désoler, ô mon âme, et gémir sur moi ? » Penses-tu trouver en toi aussi une place pour le Seigneur ? Et quelle place en nous est digne d’une telle gloire, et suffit-elle à recevoir sa Majesté ? Puissé-je seulement l’adorer aux lieux où se sont arrêtés ses pas ? Qui m’accordera de pouvoir au moins suivre les traces d’une âme sainte « qu’il s’est choisie pour son domaine » ? Cependant puisse-t-il aussi daigner répandre en mon âme l’onction de sa miséricorde, si bien que je sois capable de dire, moi aussi : « Je cours dans la voie de tes volontés, car tu mets mon cœur au large ». Je pourrai peut-être, moi aussi, montrer en moi, sinon « une grande salle toute prête, où il puisse manger avec ses disciples », du moins « un endroit où il puisse reposer sa tête ». (…)

Il est nécessaire que l’âme grandisse et s’élargisse pour être capable de Dieu. Or, sa largeur, c’est son amour, comme dit l’apôtre Paul : « Élargissez-vous dans la charité ». Car, bien que l’âme n’ait aucune dimension spatiale puisqu’elle est esprit, la grâce lui confère ce que sa nature exclut. (…) La grandeur de chaque âme est donc à la mesure de sa charité. Si bien que celle qui a beaucoup de charité est grande, celle qui en a peu est petite, celle qui n’a rien est néant. Saint Paul affirme en effet : « Si je n’ai pas l’amour, je suis rien .»

Saint Bernard (1091-1153)

 

(Références bibliques : Jn 14,23; Ps 21,4; Ep 3,17; Jn 1,3; Ps 131,14; Ct 2,10; Ps 41,6; Ps 32,12; Jn 14,23; Ps 118,32; Mc 14,15; Mt 8,20; 2Co 6,13; 1Co 13,3)

La charité du chrétien

dimanche 9 mai 2021

Tu es chrétien par et pour la charité ;
par rien d’autre et pour rien d’autre. (…)

La charité est plus que le nécessaire pour exister,
plus que le nécessaire pour vivre,
plus que le nécessaire pour agir ;
La charité est notre vie devenant vie éternelle.
Quand nous laissons la charité, nous laissons notre vie.
Un acte sans charité est une mort subite,
un acte de la charité est une résurrection immédiate.

Tu ne peux fabriquer la charité : tu la reçois.
La charité imparfaite est un don incomplètement reçu ;
la charité parfaite est un don complètement reçu.
La charité est gratuite tout autant qu’elle est nécessaire.
Tu ne la gagnes pas comme un concours.
Tu la gagnes en la désirant, en la demandant, en la recevant
et en la transmettant.

On n’apprend pas la charité, on fait peu à peu sa connaissance,
en faisant la connaissance du Christ.
C’est la foi du Christ qui nous rend capables de charité ;
c’est la vie du Christ qui nous révèle la charité ;
c’est la vie du Christ qui nous montre comment désirer,
demander, recevoir la charité.
C’est l’esprit du Christ qui nous rend vivants de charité,
agissants par la charité,
féconds de charité.

Tout peut servir à la charité,
Sans elle tout est stérile et d’abord nous-mêmes.

Vénérable Madeleine Delbrêl (1904-1964)

 

 

« Vous n’avez qu’un seul maître et vous êtes tous frères. » (Mt 23,8)

mardi 2 mars 2021

« Vous n’avez tous qu’un Père qui est Dieu : vous êtes tous des frères. » Vous nous le dites nettement, mon Seigneur Jésus : tous les hommes forment une grande famille ; tous sont frères, Dieu est le Père commun : tous doivent avoir les uns pour les autres les pensées, les paroles, les actes qu’un bon père veut que ses enfants aient entre eux.

L’amour que le meilleur des pères veut voir régner entre ses enfants, voilà l’amour que nous devons à tous les hommes, à chacun des hommes, sans exception. Et notre modèle, Jésus, nous en donne l’exemple : c’est Dieu qui vient sur la terre nous montrer sous la forme humaine comment il veut que chaque homme aime les autres hommes. Que fait Jésus ? Il vit trente-quatre ans et il donne son sang au milieu des plus affreux tourments pour la sanctification et le salut de tous les hommes, non seulement de tous en général mais de chacun en particulier, en sorte qu’il n’est aucun homme dont on ne doive dire : cet homme, Jésus est mort pour le sauver et le sanctifier. Après le précepte de l’amour fraternel, voici l’exemple comme l’a donné Jésus. Comme le dit S. Paul, « c’est votre frère, que le Christ a racheté à si grand prix ! » (cf. 1 Co 6, 20)

Tout homme est notre vrai frère en Dieu, et tout homme a été tant aimé et estimé si haut par Jésus qu’il est mort pour lui. Tout homme doit nous apparaître comme un frère, et un frère couvert comme d’un manteau du Sang de Jésus.

Bienheureux Charles de Foucauld (1858-1916)

 

 

« Moi, je vous dis : aimez vos ennemis ! »

samedi 27 février 2021

L’un de vous dira : « Je ne peux pas du tout aimer mes ennemis. » Partout dans les Saintes Écritures, Dieu t’a dit que tu le peux ; et toi, tu réponds au contraire que tu ne peux pas ? Réfléchis maintenant : qui doit-on croire, Dieu ou toi ? Puisque celui qui est la Vérité même ne peut pas mentir, que la faiblesse humaine abandonne désormais ses excuses futiles. Celui qui est juste n’a pas pu commander quelque chose d’impossible, et celui qui est miséricordieux ne condamnera pas un homme pour ce qu’il n’a pas pu éviter. Pourquoi donc nos faux-fuyants ? Personne ne sait mieux ce que nous pouvons faire que celui qui nous a donné de pouvoir. Tant d’hommes, de femmes, d’enfants, de jeunes filles si délicates ont supporté pour le Christ les flammes, le feu, le glaive et les bêtes sauvages de façon imperturbable, et nous, nous disons que nous ne pouvons pas supporter les insultes des gens stupides ? (…)

En effet, si seuls les bons doivent être aimés, que dire de la conduite de notre Dieu dont il est écrit : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique » ? (Jn 3,16) Car quel bien est-ce que le monde avait fait pour que Dieu l’aime ainsi ? Le Christ notre Seigneur a trouvé tous les hommes non seulement mauvais, mais même morts à cause du péché originel ; et cependant (…) « il nous a aimés et s’est livré lui-même pour nous » (Ep 5,2). En agissant ainsi, il a aimé même ceux qui ne l’aimaient pas, comme l’apôtre Paul le dit aussi : « Le Christ est mort pour les coupables » (Rm 5,6). Et dans sa miséricorde inexprimable il a donné cet exemple au genre humain tout entier, disant : « Apprenez de moi, car je suis doux et humble de cœur » (Mt 11,29).

Saint Césaire d’Arles (470-543)

 

 

Malheur à qui entame l’esprit de charité !

vendredi 26 février 2021

Il peut arriver, (…) qu’on « excommunie » soi-même ses frères. Comment cela ? En manquant à la charité ; en excluant quelqu’un, sinon de son cœur, du moins du rayonnement de sa charité effective. On peut encore « excommunier » quelqu’un du cœur des autres en suscitant la méfiance entre les personnes. C’est là un péché trop contraire à l’esprit chrétien, pour que nous ne nous mettions pas spécialement en garde contre lui et que nous n’agissions pas en la matière avec la plus grande délicatesse.

La société cénobitique est une, le ciment qui réunit entre eux ses différents membres est la charité. Si celle-ci vient à diminuer, la vie divine tend aussitôt à baisser dans le corps social. Quel est, en effet, le signe distinctif auquel on reconnaît infailliblement, les membres de la société chrétienne, signe donné par le Christ lui-même ? C’est l’amour mutuel (cf. Jn 13,35). Il en va de même pour la société monastique, et la vraie marque de la protection du Christ Jésus sur une communauté religieuse est la charité qui règne entre ses membres. Malheur à ceux qui entament, de quelque façon que ce soit, cet esprit de charité ! En déchirant la robe de l’Épouse, ils arrachent de leur propre âme le signe chrétien par excellence.

Le Christ est un ; il nous dit que ce que nous faisons au moindre de nos frères ‒ de ses frères ‒, en bien ou en mal, c’est à lui-même que nous le faisons (cf. Mt 25,40.45).

Bienheureux Columba Marmion (1858-1923)

 

 

La multiplication des pains

mardi 5 janvier 2021

Remarquons l’abandon confiant des disciples à la providence de Dieu dans les plus grandes nécessités de la vie et leur mépris pour une existence luxueuse : ils étaient douze et n’avaient que cinq pains et deux poissons. Ils ne se préoccupaient pas des choses du corps ; ils consacrent tout leur zèle aux choses de l’âme. En plus ils n’ont pas gardé pour eux ces provisions : ils les ont données aussitôt au Sauveur quand il les leur a demandées. Apprenons par cet exemple à partager ce que nous avons avec ceux qui sont dans le besoin, même si nous avons peu. Lorsque Jésus leur demande d’apporter les cinq pains, ils ne disent pas : « Que nous restera-t-il pour plus tard ? Où trouverons-nous ce qu’il faut pour nos besoins personnels ? » Ils obéissent tout de suite. (…)

Prenant donc les pains, le Seigneur les a rompus et a confié aux disciples l’honneur de les distribuer. Il ne voulait pas seulement les honorer par ce saint service, mais il voulait qu’ils participent au miracle pour en être les témoins bien convaincus et qu’ils n’oublient pas ce qui s’était passé sous leurs yeux. (…) C’est par eux qu’il fait asseoir les gens et qu’il distribue le pain, afin que chacun d’entre eux puissent rendre témoignage du miracle qui s’est accompli entre leurs mains. (…)

Tout dans cet événement – le lieu désert, la terre nue, le peu de pain et de poisson, la distribution des mêmes choses à tous sans préférence, chacun ayant autant que son voisin – tout cela nous enseigne l’humilité, la frugalité, et la charité fraternelle. Nous aimer les uns les autres également, mettre tout en commun parmi ceux qui servent le même Dieu, voilà ce que nous enseigne notre Sauveur ici.

Saint Jean Chrysostome (v. 345-407)

 

 

Car j’avais faim, et vous ne m’avez pas donné à manger.

dimanche 22 novembre 2020

Le Verbe est Roi, Roi du ciel et de la terre. Le Verbe vit et règne, en Dieu. Le Christ ne vit que là où il règne ; il est essentiellement Roi ; il vit en nous dans le degré où il domine tout en nous, où il règne sur nos facultés, où il commande à notre activité.

Quand en nous tout vient de lui, c’est-à-dire quand nous ne pensons plus que comme lui, quand nous ne voulons plus que ce qu’il veut, quand nous n’agissons que selon son bon plaisir, nous soumettons tout nous-même à ses pieds, alors il règne en nous. Tout ce qui est propre, personnel en nous, disparaît pour faire place aux pensées, aux vouloirs du Verbe divin. Il faut que cette domination du Christ en nous soit complète. Cent fois le jour, nous le demandons : « Que votre règne vienne ! » Oh ! Qu’il advienne, Seigneur, ce jour où vous régnerez entièrement en moi ; où aucun mobile propre ne gênera votre pouvoir en moi, où je serai comme vous, entièrement livré au Père, où aucune inspiration propre ne contristera en moi l’action de votre Esprit !

Ce jour-là, nous aurons déposé autant qu’il est en nous, nous aurons abaissé de notre mieux notre personnalité propre devant le règne du Christ. Il sera vraiment pour nous tout en toutes choses (cf. 1 Co 15,28). Moralement, nous n’aurons plus rien de propre, tout lui appartiendra, tout lui sera soumis, tout lui sera donné.

Bienheureux Columba Marmion (1858-1923)

 

 

« Puisque tu as été fidèle en si peu de chose, reçois l’autorité sur dix villes. »

mercredi 18 novembre 2020

Quoi que tu fasses, y compris aider quelqu’un à traverser la route, c’est à Jésus que tu le fais. Tu donnes un verre d’eau, et c’est à Jésus que tu l’as donné (Mt 25,35) – petit précepte de rien du tout, et pourtant crucial, toujours plus illuminateur. Nous ne devons pas craindre l’amour du Christ, d’aimer comme il a aimé. Qu’importe si notre travail est modeste, humble ; faisons-le avec l’amour du Christ lui-même.

Aussi beau que puisse être ton travail, sois-en détaché, toujours prêt à y renoncer. Ce que tu fais n’est pas tien. Les talents que Dieu t’a donnés ne sont pas les tiens ; ils t’ont été donnés afin que tu t’en serves pour la gloire de Dieu. Sois généreux et mets en œuvre tout ce qui est en toi pour plaire au bon Maître.

Qu’avons-nous à apprendre ? À être doux et humble (Mt 11,29) ; si nous le devenons, nous apprendrons à prier ; et l’apprenant, nous appartiendrons à Jésus ; et lui appartenant, nous apprendrons à croire ; et croyant, nous apprendrons à aimer ; et aimant, nous apprendrons à servir.

Sainte Teresa de Calcutta (1910-1997)