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Archive pour le mot-clef ‘coeur’

« C’est du cœur de l’homme que sortent les pensées perverses. »

mercredi 7 février 2024

« Quel est celui qui peut être jugé avec moi ? Qu’il vienne ! » (Jb 13,19 Vg) Un saint doit à l’assistance de Dieu de se garder si bien dans ses œuvres qu’extérieurement on ne trouve contre lui aucun chef d’accusation ; et intérieurement il est dans ses pensées d’une vigilance si circonspecte que, si la chose n’était pas impossible, il apparaîtrait toujours irréprochable aux yeux du juge intérieur.

Mais autant il peut parvenir à ne pas faillir extérieurement dans l’action, autant intérieurement il ne peut parvenir à ne jamais faillir dans la pensée. Car pour être tombée de l’intime de son être, la conscience de l’homme est toujours sur une pente glissante. Même un saint Job parle donc autant en son nom qu’au nom des élus quand il dit : « Quel est celui qui peut être jugé avec moi ? Qu’il vienne ! » C’est que dans sa conduite extérieure il n’a rien qui puisse être repris et c’est en homme libre qu’il appelle un accusateur.

Mais le cœur du juste se reprend quelquefois lui-même pour une folle pensée et c’est sans doute ce qui explique ces nouvelles paroles : « Qu’ai-je donc à me consumer en silence ? » (cf. Jb 13,19 Vg) C’est en silence, en effet, que se consume l’homme qui, se reprenant pour une folle pensée, se sent mordu par la dent de la conscience. C’est se consumer, en effet, en silence que de retrouver en soi-même un foyer dévorant.

Saint Grégoire le Grand (v. 540-604)

 

 

 

La loi nouvelle inscrite dans le cœur des hommes

mardi 6 février 2024

Nous avons les dix commandements, donnés par Moïse…, et tout ce que recommande la lecture des livres saints, dont ce qu’Isaïe nous a transmis : « Lavez-vous, purifiez-vous, ôtez le mal devant mes yeux. Apprenez à faire le bien, recherchez ce qui est juste ; prenez la défense de l’opprimé, de la veuve, de l’orphelin. Venez et parlons ensemble, dit le Seigneur » (Is 1,16s)… Mais nous avons aussi les lois du Verbe, la Parole de Dieu, les paroles d’encouragement non écrites sur des tables de pierre par le doigt du Seigneur (Ex 24,12), mais inscrites dans le cœur des hommes (2Co 3,3)… Ces deux lois ont servi au Verbe pour la pédagogie de l’humanité, d’abord par la bouche de Moïse, ensuite par celle des apôtres…

Mais nous avons besoin d’un maître pour expliquer ces paroles saintes… ; c’est lui qui nous enseignera les paroles de Dieu. L’école, c’est notre Église ; notre unique Maître, c’est le Fiancé, volonté bonne d’un Père bon, sagesse originelle, sainteté de la connaissance. « C’est lui la victime offerte pour nos péchés », dit saint Jean (1Jn 2,2) ; c’est lui qui guérit nos corps et nos âmes, l’homme tout entier, lui Jésus qui est « la victime offerte non seulement pour nos péchés, mais pour ceux du monde tout entier. Et voici comment nous pouvons savoir que nous le connaissons : c’est en gardant ses commandements » (v. 3)… « Celui qui déclare demeurer en lui doit marcher dans la voie où lui, Jésus, a marché » (v. 6)

Nous qui sommes les élèves de cette bienheureuse pédagogie, parachevons le beau visage de l’Église et accourons comme des petits enfants vers cette mère pleine de bonté. Écoutons le Verbe de Dieu ; glorifions la bienheureuse disposition qui nous guide par cet Enseignant et nous sanctifie comme enfants de Dieu. Nous serons citoyens du ciel si nous sommes les élèves de cet Enseignant sur la terre, et là-haut nous comprendrons tout ce qu’il nous a enseigné concernant le Père.

Saint Clément d’Alexandrie (150-v. 215)

 

 

 

« Tu aimeras de tout ton cœur. »

vendredi 17 mars 2023

Nous ne savons pas assez ce que Dieu veut de notre cœur, nous n’avons pas assez appris de Jésus dans l’Évangile que Dieu ne rejette pas le cœur qu’il a créé, que Dieu veut et peut convertir notre cœur, que Dieu veut que nous l’aimions de « tout notre cœur », que la charité déborde et dépasse notre cœur mais c’est dans notre cœur qu’elle « prend chair » en nous. Jésus n’est pas venu pour arracher notre cœur mauvais et faire de nous des hommes sans cœur, mais pour nous donner un cœur nouveau capable de devenir pareil au sien. L’Évangile d’un bout à l’autre nous enseigne, nous montre, nous propose la conversation du cœur.

Pour vivre il faut aimer. Le Sacré-Cœur, le cœur du Christ nous montre comment on est fait quand on est ressuscité du péché et vivant de la vie éternelle. Ce cœur que nous avons à recopier, à reproduire, à continuer sur le vif n’est pas seulement un cœur de juste. Pour lui ressembler, il ne suffit pas de remettre notre cœur à nous dans le bon sens, de le vérifier, de le rectifier, bref de faire un examen de conscience et des exercices de perfection.

Pour être le cœur de l’homme nouveau, il faut que ce cœur soit un cœur d’enfant de Dieu, un cœur qui accepte d’être envahi, dynamisé, possédé par l’amour de Dieu, par Dieu qui est Amour. Et ce cœur nouveau, ce cœur greffé de vie nouvelle, doit accepter filialement, c’est-à-dire librement, que l’amour de Dieu devienne en lui passion d’homme : la passion de donner à Dieu, pour le monde, et sans cesse, et tout entière, la vie qu’à chaque instant lui-même nous donne.

Vénérable Madeleine Delbrêl (1904-1964)

 

 

 

La Loi enracinée dans nos cœurs

dimanche 12 février 2023

Il y a des préceptes naturels de la Loi qui donnent déjà la justice ; même avant le don de la Loi à Moïse des hommes observaient ces préceptes, et ils étaient justifiés par leur foi et plaisaient à Dieu. Ces préceptes-là, le Seigneur ne les a pas abolis, mais étendus et accomplis. C’est ce que prouvent ces paroles : « Il a été dit aux anciens : Tu ne commettras pas d’adultère. Mais moi, je vous dis : Quiconque regarde une femme pour la convoiter a déjà commis l’adultère avec elle dans son cœur. » Et encore : « Il a été dit : Tu ne tueras pas. Mais moi, je vous dis : Quiconque se met en colère contre son frère sans motif en répondra au tribunal » (Mt 5,21s). (…) Et ainsi de suite. Tous ces préceptes n’impliquent ni la contradiction ni l’abolition des précédents, mais leur accomplissement et leur extension. Comme le Seigneur le dit lui-même : « Si votre justice ne dépasse celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez pas dans le Royaume des cieux » (Mt 5,20).

En quoi consistait-il, ce dépassement ? D’abord, à croire non plus seulement au Père, mais aussi à son Fils dorénavant manifesté, car c’est lui qui mène l’homme à la communion et à l’union avec Dieu. Ensuite, à ne pas dire seulement, mais à faire — car « ils disaient et ne faisaient pas » (Mt 23,3) — et à se garder non seulement des actes mauvais, mais même de leur désir. En enseignant cela, il ne contredisait pas la Loi, mais il accomplissait la Loi et enracinait en nous les prescriptions de la Loi. (…) Prescrire de s’abstenir non seulement des actes défendus par la Loi, mais même de leur désir, n’est pas le fait de quelqu’un qui contredit et abolit la Loi ; c’est le fait de celui qui l’accomplit et l’étend.

Saint Irénée de Lyon (v. 130-v. 208)

 

 

La perfection d’un cœur pur

mercredi 8 février 2023

En vérité, c’est tout autre chose d’avoir en haine la souillure des vices et de la chair, parce que l’on goûte le bien déjà présent, ou de réfréner les convoitises illicites en vue de la récompense future ; de craindre un dommage présent, ou de redouter des tourments à venir. C’est enfin une perfection beaucoup plus grande de ne vouloir pas s’éloigner du bien pour l’amour du bien lui-même, que de ne pas donner son consentement au mal par peur de souffrir un autre mal.

Dans le premier cas, le bien est volontaire ; dans le second, il paraît forcé, et arraché de haute lutte à un refus par la crainte du supplice ou l’appétit de la récompense. Aussi bien, celui qui ne renonce aux séductions du vice que par le motif de la crainte, retournera, dès que la crainte sera évanouie qui lui faisait obstacle, vers l’objet de ses amours. Pour lui, pas de stabilité dans le bien. Point de repos non plus du côté de la tentation, parce qu’il n’a point la paix solide et constante que donne la chasteté. Où règne le tumulte de la guerre, il est impossible d’échapper au risque d’être blessé. (…)

Celui, au contraire, qui a surmonté les assauts du vice et jouit désormais de la sécurité de la paix, entièrement transformé en l’amour de la vertu pour elle-même, demeurera constant dans le bien auquel il appartient sans partage, parce qu’il n’existe pas, à ses yeux, de plus sensible dommage qu’une atteinte portée à la chasteté intime de son âme. La pureté qu’il a présente, fait son plus cher et plus précieux trésor, comme le plus grave des châtiments serait de voir les vertus pernicieusement violées, ou d’éprouver la souillure empoisonnée du vice.

Saint Jean Cassien (v. 360-435)

 

 

« Tu aimes la vérité, mon Dieu, au fond du cœur. » (Ps 50,8)

mercredi 10 février 2021

Le Christ nous a enseigné que Dieu n’est pas à chercher en un lieu déterminé et nous a appris qu’ « un sacrifice est offert à son nom en tout endroit de la terre » (Ml 1,11). En effet, c’est maintenant « le temps où les vrais adorateurs adorent le Père », non plus à Jérusalem ni sur le mont Garizim, « mais en esprit et en vérité » (Jn 4,21.24). Ce n’est donc pas dans un lieu ni sur la terre que Dieu habite, mais dans le cœur. Vous cherchez alors où se trouve Dieu ? Dieu se trouve en un cœur pur. C’est là en effet qu’il fera sa demeure, selon ce qu’il a dit par le prophète : « J’habiterai et je marcherai au milieu d’eux, et ils seront mon peuple et je serai leur Dieu, dit le Seigneur » (Lv 26,12).

Remarquez bien que chacune de nos âmes contient en quelque sorte un puits d’eau vive ; il y a en elle un certain sens céleste, une image de Dieu enfouie. (…) Il est là, le Verbe de Dieu, et son opération actuelle est de dégager le sable de votre âme à chacun, pour faire jaillir votre source. Cette source est en vous et ne vient pas du dehors, car « le Royaume de Dieu est au-dedans de vous » (Lc 17,21).

Ce n’est pas au dehors, mais chez elle que la femme qui avait perdu sa pièce d’argent l’a retrouvée. « Elle avait allumé sa lampe, elle avait balayé sa maison » (Lc 15,8) des ordures et des saletés qui s’y étaient accumulées par sa négligence, et c’est là qu’elle a retrouvé sa pièce d’argent. Quant à vous, si vous allumez votre lampe, si vous vous servez de l’illumination du Saint Esprit, « si vous voyez la lumière dans sa lumière » (Ps 36,10), vous trouverez la pièce d’argent en vous. Car c’est en vous que se trouve l’image du roi céleste.

Origène (v. 185-253)

 

 

 

Jésus dit : « Tu aimeras. »

vendredi 20 mars 2020

L’amour est ce qui mesure, en dernier ressort, la valeur de tous nos actes, même des plus ordinaires. Aussi Saint Benoît indique-t-il comme tout premier “instrument” l’amour de Dieu : « Avant tout, aimer le Seigneur de toute son âme, de tout son esprit, de tout son cœur ». Autant nous dire : « Placez l’amour dans votre cœur avant toutes choses ; que l’amour vous régisse et vous guide dans toutes vos actions ; c’est l’amour qui doit mettre en vos mains tous les autres instruments des bonnes œuvres ; c’est lui qui donnera aux détails les plus insignifiants de vos journées une haute valeur. Les petites choses, dit S. Augustin, sont petites en elles-mêmes, mais elles deviennent grandes par l’amour fidèle qui les fait accomplir (De doctina christiana, 1. IV, c. 18) ». (…)

L’idéal auquel nous devons viser est (…) l’exactitude de l’amour, non le scrupule ni la préoccupation de ne pas se tromper ni le désir de pouvoir se dire : « Je veux qu’on ne puisse jamais me trouver en défaut » : il y a en cela de l’orgueil. C’est du cœur que jaillit la vie intérieure ; et si vous la possédez, vous chercherez à remplir par amour toutes vos prescriptions, avec la plus grande pureté d’intention et le plus de soin possible. (…)

La vraie valeur d’une chose se trouve dans le degré de l’union que nous lui donnons avec le Christ par la foi et la charité. Il faut tout exécuter, mais par amour pour notre Père des cieux et en union, par la foi, avec Notre-Seigneur. Ne l’oublions jamais : la source même de la valeur de nos œuvres est dans notre union au Christ Jésus par la grâce, dans l’amour avec lequel nous accomplissons nos actions. À cet effet, il faut, comme dit S. Benoît, diriger notre intention vers Dieu avant chaque bonne entreprise, avec une grande intensité de foi et d’amour.

Bienheureux Columba Marmion (1858-1923)

 

 

 

« Ce peuple m’honore des lèvres mais son cœur est loin de moi. »

mardi 11 février 2020

Imaginons qu’il y a en nous un palais d’une immense richesse, construit tout en or et en pierres précieuses, digne enfin du Maître auquel il appartient. Puis dites-vous, mes sœurs, que la beauté de cet édifice dépend aussi de vous. C’est vrai, car est-il plus bel édifice qu’une âme pure et pleine de vertus ? Plus elles sont grandes, plus les pierreries resplendissent. Enfin, songez que dans ce palais habite ce grand Roi qui a bien voulu se faire notre Père ; il se tient sur un trône de très haut prix, qui est votre cœur. (…)

Peut-être rirez-vous de moi, et direz-vous que c’est fort clair, et vous aurez raison, mais cela a été obscur pour moi pendant un certain temps. Je comprenais bien que j’avais une âme, mais l’estime que méritait cette âme, la dignité de celui qui l’habitait, voilà ce que je ne comprenais pas. Les vanités de la vie étaient comme un bandeau que je mettais sur les yeux. Si j’avais compris, comme je le fais aujourd’hui, qu’en ce tout petit palais de mon âme habite un si grand Roi, je ne l’aurais pas laissé seul si souvent ; je me serais tenue de temps en temps près de lui, et j’aurais fait le nécessaire pour que le palais soit moins sale. Qu’il est donc admirable de songer que celui dont la grandeur emplirait mille mondes et beaucoup plus, s’enferme ainsi en une si petite demeure !

Sainte Thérèse d’Avila (1515-1582)

 

 

 

 

Jésus illumine l’espace du cœur

dimanche 9 février 2020

Le sel sensible donne de la saveur au pain et à tout aliment, empêche de pourrir certaines viandes et les conserve longtemps. Considère qu’il en va de même de la garde de l’intelligence. Car elle comble de saveur divine l’homme intérieur comme l’homme extérieur, elle chasse l’odeur fétide des pensées mauvaises, et nous donne de persévérer dans le bien. De la suggestion naissent de nombreuses pensées, et de celles-ci la mauvaise action sensible. Mais celui qui avec Jésus éteint aussitôt la première, échappe à la suite et s’enrichira de la douce connaissance divine par laquelle il trouvera Dieu qui est partout présent.

Tenant devant Dieu le miroir de l’intelligence, il est continuellement illuminé, à l’image du cristal pur et du soleil sensible. Alors, parvenue à la cime ultime des désirs, l’intelligence se reposera en lui de toute autre contemplation. (…) Il est impossible que celui qui regarde le soleil n’ait pas ses yeux inondés de lumière. De même celui qui se penche toujours sur l’espace de son cœur ne peut pas ne pas être illuminé. (…) Quand les nuages se dissipent, l’air apparaît pur. De même, quand sous le soleil de justice, Jésus Christ, se dissipent les fantasmes des passions, ne cessent de naître dans le cœur des pensées lumineuses, pareilles aux étoiles. Car Jésus illumine l’espace du cœur.

Hésychius le Sinaïte

 

 

 

« Dieu regarde le cœur. » (1S 16,7)

dimanche 29 septembre 2019

Est-ce que ce pauvre a été reçu par les anges à cause du seul mérite de sa pauvreté ? Et le riche a-t-il été livré aux tourments par la seule faute de sa richesse ? Non : comprenons-le bien, c’est l’humilité qui a été honorée dans le pauvre, et l’orgueil condamné dans le riche.

Voici, en bref, la preuve que ce ne sont pas les richesses mais l’orgueil qui a valu au riche son châtiment. Le pauvre a donc été porté dans le sein d’Abraham ; mais l’Écriture dit d’Abraham qu’il avait beaucoup d’or et d’argent et qu’il était riche sur terre (Gn 13,2). Si tout riche est envoyé dans les tourments, comment Abraham a-t-il pu devancer le pauvre pour le recevoir dans son sein ? C’est qu’Abraham, au milieu de ses richesses, était pauvre, humble, respectueux et obéissant à tous les ordres de Dieu. Il tenait ses richesses pour si peu de choses que, lorsque Dieu le lui a demandé, il a accepté d’offrir en sacrifice son fils à qui il destinait ces richesses (Gn 22,4).

Apprenez donc à être pauvres et dans le besoin, soit que vous possédiez quelque chose en ce monde, soit que vous ne possédiez rien. Car on trouve des mendiants remplis d’orgueil et des riches qui confessent leurs péchés. « Dieu résiste aux orgueilleux », qu’ils soient couverts de soie ou de haillons, « mais il donne sa grâce aux humbles » (Jc 4,6), qu’ils possèdent ou non les biens de ce monde. Dieu regarde l’intérieur ; c’est là qu’il pèse, là qu’il examine.

Saint Augustin (354-430)